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Poèmes dialogués entre tenson et tanka, deux formes venant du Moyen-Age.Un an de relations entre un homme et une femme.
Méfiez-vous de l'éternité qui n'est pas dans l'instant disait Haldas : Guilhem Joanjordi est cavalier et pratiquant d'aïkido. A ces deux arts, il a volé les techniques de l'éphémère et les stratégies des temps, le goût du souffle et de la connexion avec le mouvement. Pyrénéiste, amateur de thé, il est aussi lecteur des troubadours et auteur de tankas, ces poèmes japonisants dont l'écriture pouvait, dans l'Extrême-Orient médiéval, valoir la mort au roturier qui s'y essayait. C'est à travers l'éloge de la lenteur qu'il a appris le don du réel, cette froissure qui se donne seulement après une longue ivresse dans la méditation des choses et la maturation des improbables. Longtemps professeur en collège et en lycée d'une langue qui s'entend entre deux mers, trois montagnes et autant de nations, cette langue de brutes qui a civilisé l'Europe, il sait le poids de la longue histoire, celle dans laquelle murissent les phrases que l'on cache tout autant que les mots que l'on exhibe, ces secrets que l'on oublie à force de les avoir tus. Et puis aussi, s'il a appris avec Manciet que la peau ne ment pas, Delpastre lui a enseigné la réalité nichée de l'autre côté de la soie du ciel. Lui, à la vérité, depuis longtemps, il ne croit plus aux masques, aux nuages, aux bulles et aux fumées mais à l'équilibre des galops, à la mémoire des sentiers, aux jeux des petits chats et à ce mouvement de la coupe du sabre qui réunit autant qu'il sépare.
Le poème dialogué est un des plus anciens genres littéraires de l'humanité. Au XIIe siècle, chez les troubadours, il prend le nom de tenson et représente alors une joute verbale. Parmi les premiers poètes qui l'utilisent on trouve Giraud de Bornelh, le «maître des troubadours», ou cinquante ans plus tard, Giacomo da Lentini, l'inventeur du sonnet. Le genre est ensuite repris par des poètes comme Chrétien de Troyes, Dante, les poètes espagnols, portugais, corses, basques, ces bertsularis qui se livrent encore à des compétitions de chants à l'heure actuelle... Sous d'autres latitudes, en orient, ce seront les renga ou les renku, ces formes que les lecteurs de la Revue du tanka francophone connaissent bien... Dans ce recueil, ces pages que vous avez entre les mains, de quoi s'agit-il ? Simplement d'un an de vie. Un an de la relation entre une femme et un homme. Mais, précisément, dans cette tradition d'un art vivant, un an qui est « esquissé », au sens des arts plastiques, sous la forme de vingt-cinq poèmes dialogués, c'est-à-dire d'échanges réguliers de petites strophes poétiques réunies dans la cohérence de textes plus longs : des tensons composées de tankas.
