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Chassé de Russie par la révolution d'Octobre, chassé d'Allemagne puis de France par le nazisme, Vladimir Nabokov, écrivain libre, rêvait ses histoires dans une langue et les écrivait dans une autre. Ce premier volume d'une édition qui en comprendra trois est capital à cet égard. De Machenka à l'Invitation au supplice, c'est-à-dire de 1928 à 1938 (si l'on ne prend en compte que les dates de première édition), s'opère en huit romans une «transmigration verbale». D'abord écrites en russe, puis traduites en français ou en anglais, ces œuvres furent ultérieurement récupérées par Nabokov, qui s'attacha généralement à en donner une nouvelle version, en langue anglaise. Opération essentielle : il ne s'agit pas, pour l'auteur de se traduire, mais de s'approprier une nouvelle langue de création, qui, bientôt, fera de lui l'un des tout premiers écrivains américains. Quant aux thèmes de ces romans, ce sont déjà ceux qui structureront l'ensemble de l'œuvre : la nostalgie de la mère-patrie, la quête passionnée de l'amour transgressif, la perte de l'identité, et le combat d'un individu créatif contre un régime qui veut l'asservir.
Né en 1899 à Saint-Pétersbourg, Vladimir Nabokov appartenait à une famille de vieille noblesse russe. Il fit ses études dans une école privée de Saint-Pétersbourg, puis, sa famille ayant fui la Russie communiste en 1919, au Trinity College à Cambridge. Il vécut ensuite en Angleterre, en Allemagne et en France avant d'émigrer aux États-Unis où il se fait naturaliser en 1945. Nabokov a enseigné la littérature dans plusieurs universités américaines et en particulier la littérature russe à l'université de Cornell à partir de 1948. À la fin de sa vie, Nabokov résidait en Suisse où il est mort en juillet 1977.