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Pour l'auteur, l'homme vit simultanément dans deux corps, celui biologique et celui érotique, qui, loin d'être des concepts, correspondent à deux réalités distinctes. Il explique le processus, appelé subversion libidinale, grâce auquel le corps érotique se décolle peu à peu du corps biologique et se construit, rencontrant parfois des obstacles, sources de symptômes ou de diminution du sens moral.
Christophe Dejours, psychanalyste et psychiatre, est professeur au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) à Paris. Il a notamment publié Souffrance en France et Travail vivant.
« De l'amour de soi, à commencer par l'amour de son propre corps, dépend la sensibilité à l'égard de la subjectivité de l'autre. »
Cela surprendra, mais nous avons deux corps ! Le corps biologique, qui est celui qu'on examine au microscope ou qu'on soigne avec des antibiotiques ; et le corps érotique, au travers duquel nous éprouvons la vie, la souffrance, le plaisir, l'excitation sexuelle, le désir. À partir du corps biologique, qui relève de l'inné, se construit progressivement l'autre corps, le corps érotique, qui relève donc de l'acquis. Mais que se passe-t-il quand cette construction rencontre des obstacles qui la mettent en échec ? Une vulnérabilité du corps s'installe, qui peut se manifester par la formation de symptômes psychopathologiques, mais aussi par une réduction de la sensibilité à la souffrance (la sienne comme celle d'autrui), par exemple dans le cas des psychopathes. Peut-on alors, sur cette base, former une conception psychanalytique du sens moral ?