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Un numéro consacré à J. Gracq qui, après avoir abandonné l'écriture de fiction, publia à partir de 1970 des ouvrages mélangeant autobiographie, réflexions sur la littérature et méditations géographiques.
Homme réservé, esprit solitaire et courtois qui ne s'en laissait pas conter par l'air du temps, soucieux d'exactitude et doté d'un goût prononcé pour les données irrécusables de l'histoire et de la géographie, Julien Gracq fut aussi un guetteur au regard pénétrant, attiré par la route et les cheminements initiatiques. On se souvient qu'il était si farouchement étranger aux complaisances de son époque qu'il refusa le Goncourt attribué au Rivage des Syrtes en 1951.. Peu d'oeuvres sont aussi aisément reconnaissables que la sienne dans leur timbre, leur climat, les figures de leur imaginaire, et à ce point diverses dans leurs rythmes, leurs expressions et leurs formes. . Récits, théâtre, poésie, essai, pamphlet, notes de voyage et de lecture, la variété des genres est grande, mais par où que l'on entre dans l'oeuvre, fût-ce par le Château d'Argol, gorgé de drame et de significations, ou La Presqu'île, flânerie d'une après-midi devenue récit, par l'essai sur André Breton ou les notes des Lettrines, c'est une même poétique du monde qu'on perçoit.. C'est la même voix qu'on entend pour dire un instant de la vie, une route, un coin de terre, le tracé d'une écriture, l'essence d'un livre. Comme le souligne ici même Régis Debray, « l'ouverture de compas d'un Gracq vagabondant à travers les genres et les paysages - à la fois comme lecteur, capteur d'ondes, et collectionneur de signes des temps -, son génie de l'analogie et l'acuité de ses courts-circuits chronologiques - peuvent faire de son oeuvre à la fois un métronome pour mieux s'y retrouver dans la fugue étrange des âges et un télescope pour mieux embrasser toute la face de la Terre. » Maintes facettes de Gracq, parfois insoupçonnées ou méconnues, sont mises en lumière dans ce numéro d'Europe. Dirigé par Bernhild Boie, à qui l'on doit l'édition de Gracq dans « La Pléiade », voici un volume qui est au diapason d'une oeuvre et d'un écrivain dont Georges Perros a pu dire : « Chaque fois que je suis tombé sur un texte de Gracq, j'ai ressenti une jubilation, ou mieux, une brûlure. Un peu comparable à celle que provoque une boule de neige dans la paume. ».