couverture

Distinction (La)

Critique sociale du jugement

Bourdieu, Pierre

  • Éditeur : Minuit
  • Collection : Le Sens commun
  • 686 pages
  • ISBN 9782707302755
  • Paru le 1 août 1979
  • 62,95 $ *
  • Sciences sociales

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Résumé

Classeurs classés par leurs classements, les sujets sociaux se distinguent par les distinctions qu’ils opèrent — entre le savoureux et l’insipide, le beau et le laid, le chic et le chiqué, le distingué et le vulgaire — et où s’exprime ou se trahit leur position dans les classements objectifs. L’analyse des relations entre les systèmes de classement (le goût) et les conditions d’existence (la classe sociale) qu’ils retraduisent sous une forme transfigurée dans des choix objectivement systématiques (« la classe ») conduit ainsi à une critique sociale du jugement qui est inséparablement un tableau des classes sociales et des styles de vie. On pourrait, à titre d’hygiène critique, commencer la lecture par le chapitre final, intitulé « Éléments pour une critique vulgaire des critiques pures », qui porte au jour les catégories sociales de perception et d’appréciation que Kant met en œuvre dans son analyse du jugement de goût. Mais l’essentiel est dans la recherche qui, au prix d’un énorme travail d’enquête empirique et de critique théorique, conduit à une reformulation de toutes les interrogations traditionnelles sur le beau, l’art, le goût, la culture. L’art est un des lieux par excellence de la dénégation du monde social. La rupture, que suppose et accomplit le travail scientifique, avec tout ce que le discours a pour fonction ordinaire de célébrer, supposait que l’on ait recours, dans l’exposition des résultats, à un langage nouveau, juxtaposant la construction théorique et les faits qu’elle porte au jour, mêlant le graphique et la photographie, l’analyse conceptuelle et l’interview, le modèle et le document. Contre le discours ni vrai ni faux, ni vérifiable ni falsifiable, ni théorique ni empirique qui, comme Racine ne parlait pas de vaches mais de génisses, ne peut parler du Smig ou des maillots de corps de la classe ouvrière mais seulement du « mode de production » et du « prolétariat » ou des « rôles » et des « attitudes » de la « lower middle class », il ne suffit pas de démontrer ; il faut montrer, des objets et même des personnes, faire toucher du doigt — ce qui ne veut pas dire montrer du doigt, mettre à l’index — et tâcher ainsi de forcer le retour du refoulé en niant la dénégation sous toutes ses formes, dont la moindre n’est pas le radicalisme hyperbolique de certain discours révolutionnaire. Cet ouvrage est paru en 1979.

Biographie de l'auteur.e

Pierre Bourdieu (1930-2002), ancien élève de l’École normale supérieure, agrégé de philosophie. Il a notamment dirigé l’EHESS, ainsi que le Centre de sociologie de l’éducation et de la culture (EHESS-CNRS), le Centre de sociologie européenne (CSE), la revue Actes de la recherche en sciences sociales, la collection « Le sens commun » aux Éditions de Minuit, la revue internationale des livres Liber et la collection « Liber » aux Éditions du Seuil. Il a été Professeur titulaire de la chaire de sociologie du Collège de France de 1982 à 2001.

Quatrième de couverture

Classeurs classés par leurs classements, les sujets sociaux se distinguent par les distinctions qu’ils opèrent — entre le savoureux et l’insipide, le beau et le laid, le chic et le chiqué, le distingué et le vulgaire — et où s’exprime ou se trahit leur position dans les classements objectifs. L’analyse des relations entre les systèmes de classement (le goût) et les conditions d’existence (la classe sociale) qu’ils retraduisent sous une forme transfigurée dans des choix objectivement systématiques (« la classe ») conduit ainsi à une critique sociale du jugement qui est inséparablement un tableau des classes sociales et des styles de vie. On pourrait, à titre d’hygiène critique, commencer la lecture par le chapitre final, intitulé « Éléments pour une critique vulgaire des critiques pures », qui porte au jour les catégories sociales de perception et d’appréciation que Kant met en œuvre dans son analyse du jugement de goût. Mais l’essentiel est dans la recherche qui, au prix d’un énorme travail d’enquête empirique et de critique théorique, conduit à une reformulation de toutes les interrogations traditionnelles sur le beau, l’art, le goût, la culture. L’art est un des lieux par excellence de la dénégation du monde social. La rupture, que suppose et accomplit le travail scientifique, avec tout ce que le discours a pour fonction ordinaire de célébrer, supposait que l’on ait recours, dans l’exposition des résultats, à un langage nouveau, juxtaposant la construction théorique et les faits qu’elle porte au jour, mêlant le graphique et la photographie, l’analyse conceptuelle et l’interview, le modèle et le document. Contre le discours ni vrai ni faux, ni vérifiable ni falsifiable, ni théorique ni empirique qui, comme Racine ne parlait pas de vaches mais de génisses, ne peut parler du Smig ou des maillots de corps de la classe ouvrière mais seulement du « mode de production » et du « prolétariat » ou des « rôles » et des « attitudes » de la « lower middle class », il ne suffit pas de démontrer ; il faut montrer, des objets et même des personnes, faire toucher du doigt — ce qui ne veut pas dire montrer du doigt, mettre à l’index — et tâcher ainsi de forcer le retour du refoulé en niant la dénégation sous toutes ses formes, dont la moindre n’est pas le radicalisme hyperbolique de certain discours révolutionnaire. Cet ouvrage est paru en 1979.