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Qu’est-ce qui nous affecte ? Assistons-nous à un retour du sensible ? Ces questions, l’hypersensible contemporain les repose dans l’art, la pensée, l’écriture. Il invite à réhabiliter ce qui, en chacun de nous, apparaît trop souvent comme une faiblesse à surmonter : la fragilité, la vulnérabilité. Qualités dites « féminines » ? Ce dont les hommes en tout cas devaient autrefois se garder, préservant leur impénétrabilité – ce tabou fondateur de toute différenciation. L’hypersensibilité doit se concevoir comme un outil d’analyse, un instrument de connaissance fine au service d’un mode de pensée subtil, aussi fragile qu’endurant, permettant d’inventer d’autres modalités créatrices, étrangères à l’habituel partage sexué. Selon quelle autre logique que celle de l’éternelle division qui oppose la douceur réceptive des unes à la force de pénétration des autres ? Question que posèrent eux aussi Deleuze ou Barthes, mais également quelques femmes peu soucieuses d’incarner la force phallique du pouvoir intellectuel de l’époque, comme Marguerite Duras, laquelle joua crânement l’idiotie ou Louise Bourgeois, l’éternelle femme-enfant destructrice et moqueuse. Question laissée en suspens (c’est sa définition même que d’imaginer le suspens des oppositions) et qu’il faut donc inlassablement reprendre.
Professeure à l’Université Paris Diderot, ancienne présidente du Collège international de philosophie, éditrice chez Gallimard des œuvres d’Antonin Artaud, Evelyne Grossman est spécialiste de théorie littéraire. Elle inscrit ses travaux au croisement de la littérature, de la philosophie et de la psychanalyse.
Qu’est-ce qui nous affecte ? Assistons-nous à un retour du sensible ? Ces questions, l’hypersensible contemporain les repose dans l’art, la pensée, l’écriture. Il invite à réhabiliter ce qui, en chacun de nous, apparaît trop souvent comme une faiblesse à surmonter : la fragilité, la vulnérabilité. Qualités dites « féminines » ? Ce dont les hommes en tout cas devaient autrefois se garder, préservant leur impénétrabilité – ce tabou fondateur de toute différenciation. L’hypersensibilité doit se concevoir comme un outil d’analyse, un instrument de connaissance fine au service d’un mode de pensée subtil, aussi fragile qu’endurant, permettant d’inventer d’autres modalités créatrices, étrangères à l’habituel partage sexué. Selon quelle autre logique que celle de l’éternelle division qui oppose la douceur réceptive des unes à la force de pénétration des autres ? Question que posèrent eux aussi Deleuze ou Barthes, mais également quelques femmes peu soucieuses d’incarner la force phallique du pouvoir intellectuel de l’époque, comme Marguerite Duras, laquelle joua crânement l’idiotie ou Louise Bourgeois, l’éternelle femme-enfant destructrice et moqueuse. Question laissée en suspens (c’est sa définition même que d’imaginer le suspens des oppositions) et qu’il faut donc inlassablement reprendre.