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D’un côté, il y a un père bricoleur grand amateur de Bach, de l’autre, il y a une tribu de six enfants (cinq garçons et une fille), tous nés à un an d’intervalle, et entre les deux, une mère qui brûle systématiquement le roastbeef. Voilà les principaux acteurs de ce roman qui raconte le quotidien d’une famille bigarrée et qui s’intéresse à cette formidable «course à relais générationnelle» qui fixe l’identité des individus.Laissée pour compte par un père pas très doué pour la communication, la tribu constituée de Jacques, Christiane, Pierre, Jean-François, Jean-Luc et Benoît, n’a d’autre choix que de chercher la vérité avec les moyens du bord et d’appréhender le réel en « masse compacte ». La force et la cohésion du groupe face à un homme seul crée chez ces êtres espiègles le goût de faire les choses autrement, à suivre d’autres chemins que celui qui leur est tracé. C’est grâce à l’un des membres de cette sympathique tribu – témoin on ne peut plus privilégié de la mécanique familiale – , qu’on a accès au processus de la «mue» de l’enfance à l’âge adulte par un regard à la fois rétrospectif, introspectif, mais surtout tendre sur la filiation.
Jean-François Beauchemin a été tour à tour rédacteur, concepteur, puis réalisateur à la Société Radio-Canada. Sa première trilogie, constituée de Comme enfant je suis cuit, Garage Molinari et Les Choses terrestres, s’inspirait de l’émouvante profondeur de l’enfance. Il s’est également adressé aux adolescents avec la parution en 2001 de Mon père est une chaise. Au secteur adultes, on lui doit aussi Le Petit Pont de la Louve et Turkana Boy. Avec la publication de Cette année s’envole ma jeunesse, il a complété une autre trilogie amorcée avec La Fabrication de l’aube (Prix des libraires 2007), suivie de Ceci est mon corps, et qui traite de la question du deuil et de notre rapport à la vie. Dans Le Temps qui m’est donné, il s’intéresse au microscosme bien particulier qu’est la famille.
Extrait :Pierre découvrit un jour dans le tome 8 de l’encyclopédie Science pour tous que le cerveau humain contient environ cent milliards de neurones, possédant chacun un millier de connexions. « La majorité des gens, lut-il, n’exploite pas entièrement ces prodigieuses capacités de calcul et de mémoire. » Nous nous agglutinâmes autour de lui et du beau livre bleu. Quelques lignes furent encore lues à voix haute. Un silence épais se fit dans la chambre : nous réfléchissions comme des furieux. Notre petit cercle se referma encore un peu plus. Ma sœur eut la première ce commentaire que nous autres, les mâles, n’aurions pas su encore formuler : « Oh ! et puis après tout, à quoi bon résister ? Soyons intellectuels et c’est tout, bon sang ! » Notre joie fut belle à voir. Nous nous levâmes d’un bond et, tendant nos bras vers le ciel, entamâmes une sorte de danse bruyante accompagnée de chants victorieux. Les murs vibrèrent. Des objets tombèrent de nos étagères sur le plancher. Un sommier se rompit. Qu’à cela ne tienne : nous nous jurâmes ce jour-là d’exploiter désormais sans complexes nos capacités mentales. Nous ferions mentir les auteurs de l’encyclopédie. Ce fut l’un de nos beaux jours dans le bungalow.