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Depuis 1998 et l’élection d’Hugo Chávez, plusieurs pays d’Amérique latine ont connu un «tournant à gauche». Cet élan a alors incarné un espoir de transformation sociale et de construction de diverses expériences aux accents anti-impérialistes: «révolution bolivarienne» au Venezuela, «révolution citoyenne» en Équateur, État plurinational en Bolivie, nouvelle politique avec Lula.L’époque était au changement, la «longue nuit néolibérale» semblait s’estomper, fruit d’une période de mobilisations populaires et de révoltes sociales. Les inégalités sociales et la pauvreté reculaient, Washington perdait du terrain, alors que la participation de celles et ceux d’«en bas» progressait.Plus de vingt ans après l’ouverture de ce cycle, la région est pourtant entrée de nouveau dans une zone de fortes turbulences et incertitudes, tandis que le bilan des gouvernements «progressistes», au-delà de leur diversité, est très largement contrasté. Capitalisme d’État et crise économique, colonisation des imaginaires de gauche par des logiques gestionnaires, modèles économiques basés sur le saccage des biens communs, leaderships charismatiques, dérives autoritaires, corruption et rupture avec les mouvements sociaux: les problèmes se sont accumulés.En parallèle, la réorganisation des droites sociales, politiques et religieuses, la montée des extrêmes droites, les défaites électorales, mais aussi les coups d’État parlementaires, sont désormais un fait majeur.Faire le bilan d’un cycle commencé dans l’espoir et qui s’achève dans la violence est fondamental pour comprendre l’Amérique latine actuelle.
Franck Gaudichaud est coprésident de l’association altermondialiste France Amérique latine et maître de conférences en civilisation et histoire hispano-américaine à l’Université de Grenoble. Il est l’un des coéditeurs du site www.rebelion.org et participe aux comités de rédaction des revues ContreTemps et Dissidences. Il est l’auteur de: Poder popular y cordones industriales. Testimonios sobre la dinámica del movimiento popular urbano 1970-1973 (Santiago-du-Chili, LOM, 2004); Operación Cóndor. Notas sobre el terrorismo de estado en el Cono sur (SEPHA, 2005)?; Venceremos?: Analyses et documents sur le pouvoir populaire au Chili (1970-1973) (Syllepse, 2013); et Chili 1970-1973. Mille jours qui firent trembler le monde (PUR, 2013). Il a également dirigé les livres collectifs?: Le volcan latino-américain: Gauches, mouvements sociaux et néolibéralisme (Textuel, 2008); et Amérique latine, émancipation en constructions (Syllepse, 2012).