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Cet essai est une réflexion sur l'ancrage profond du nazisme, de sa violence et de ses génocides, dans l'histoire du monde occidental. Son point de départ est un questionnement sur les liens qui rattachent la violence nazie à l'Europe du capitalisme industriel, du colonialisme, de l'impérialisme, de l'eugénisme, du darwinisme social, bref l'Europe du long XIXe siècle.
Enzo Traverso enseigne les sciences politiques à l'université de Picardie Jules Verne. Parmi ses derniers travaux, L'Histoire déchirée. Essai sur Auschwitz et les intellectuels, Cerf, Paris, 1997 et Le totalitarisme. Le XXe siècle en débat, Seuil, Paris, 2001.
La violence nazie ne doit rien au hasard : elle a une généalogie, qui n'est pas spécifiquement allemande, et un laboratoire, l'Europe libérale du XIXe siècle. Les camps d'extermination sont l'aboutissement d'un long processus de déshumanisation et d'industrialisation de la mort, amorcé par la guillotine et qui a progressivement intégré la rationalité du monde moderne, celle de l'usine, de la bureaucratie, de la prison. On peut trouver les origines culturelles du nazisme dans le «racisme de classe» qui triomphe après la Commune, dans le discours impérialiste sur l'«extinction des races inférieures» visant à légitimer les génocides coloniaux, enfin dans l'émergence d'une nouvelle image du juif - axée sur la figure de l'intellectuel - comme métaphore d'une maladie du corps social. Le nazisme réalisera la convergence entre ces différentes sources matérielles et idéologiques. Auschwitz se révèle ainsi - et c'est là que réside, selon Enzo Traverso, sa singularité - comme la synthèse d'un ensemble de modes de pensée, de domination et d'extermination profondément inscrits dans l'histoire occidentale.