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Quelque chose se détache du port se déplace à travers les expériences, souvenirs et obsessions du narrateur et les transforme en quelque chose comme une méthode, comme un système de survie, de défense et d’invention. Ce parcours prend diverses formes : aphorismes autistes, récits éclair et disjoints, spéculation allusive, littéralisme, lyrisme saboté où le je s’égare. Ces poèmes sont de fait l’énonciation troublée d’un trouble – de vie, de langage, de pensée.L’écriture s’occupe donc ici de sens comme on s’occupe d’un problème : on ne le règle pas toujours. Elle délivre du sens en le détachant de son objet, et l’en détachant elle le cache. Du sens rusé au point de se piéger lui-même, de se désorienter, et le lecteur avec. Il est donc souhaitable pour arriver à ses fins de lire comme on déjoue des leurres, en ne prenant pas des vessies pour des lanternes (mais pour des vaisseaux). Esquives et stratégies obliques meuvent ce livre, qui font entrevoir en passant les choses qui défilent, du coin de l’œil. Ce langage, plus cacheté que secret, plus codé que mystérieux, plus machiné qu’inspiré, n’est pas celui de la quête de soi. C’est celui d’une enquête sur ce qu’écrire déplace pour faire aller mieux. On s’en doute, cet art mineur échappe aux sirènes antagonistes de la révélation et du silence poétiques. Traduction d’une langue par elle-même hors d’elle-même, le narrateur va par glissements, par vagues analogiques, par dérives hors de soi, hors du pathos et des maux, mû par le démon de la dérobade et du rébus. Ce qui veut dire : pas de grande prose; pas de bonne poésie. Plutôt, quelques notes maniaques en vue d’une petite santé, comme détachables d’un carnet d’ordonnances : salades, pharmacopée, mots de passe, avec pour instruments principaux le rasoir du barbier, le bureau du douanier, les clés du concierge, le bateau du chef. Et l’écriture, cheval de Troie auto-immune.Alain Farah adresse aux lecteurs une lettre de joyeux malaise carabiné, dont ce livre est le timbré porteur, cinq ans après sa parution initiale en 2004. S’il est malaisé d’en accuser réception, même pour l’auteur aujourd’hui qui s’en ouvre en préface, on saura quoi et qui accuser – et lui aussi, semble-t-il, qui n’en pense pas moins.
Alain Farah est né à Montréal en 1979 de parents libanais d’Égypte. Il publie en 2004 au Quartanier un livre de poésie, Quelque chose se détache du port, pour lequel il est nominé au Prix Émile-Nelligan. En 2005, il s’installe temporairement en France, où il poursuit des études doctorales à l’École Normale Supérieure. À son retour au Québec en 2008, il publie au Quartanier Matamore no 29, premier roman salué par la presse pour son audace formelle et sa force critique. Ce roman sera publié deux ans plus tard à Paris chez LaureLi (Léo Scheer) et se méritera des critiques élogieuses dans Le Monde et Libération. _x000D__x000D_En 2009, l’Université McGill l’embauche comme professeur adjoint. Il succède à Yvon Rivard et enseigne la création littéraire de même que la littérature française contemporaine, son domaine de spécialité. En 2013, sa thèse de doctorat, consacrée à Nathalie Quintane et à Olivier Cadiot, paraît en France chez Classiques Garnier, sous le titre Le gala des incomparables. _x000D__x000D_En 2011, Radio-Canada lui a proposé une chronique à l’émission littéraire Plus on est de fous, plus on lit ! qu’il tient toujours. Il y présente des classiques de la littérature, dans une forme acrobatique qui mêle le récit autobiographique, le monologue fou braque et l’essai littéraire. Il a livré près de 50 chroniques jusqu’à maintenant. _x000D__x000D_Pourquoi Bologne, paru à l’automne 2013 au Quartanier, est son quatrième livre.