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Au point de départ de cet essai rédigé en 1930 et paru dans la revue Documents, un fait divers : au Père-Lachaise, un certain Gaston F. se tranche le doigt avec les dents, le soleil lui en ayant selon lui donné l'ordre. G. Bataille étudie le geste de Van Gogh se tranchant l'oreille, qu'il éclaire par l'analyse de son oeuvre et la comparaison avec les rites sacrificiels des sociétés primitives.
Il est permis de douter que même les plus furieux de ceux qui se sont jamais déchirés et mutilés au milieu des cris et des coups de tambour aient abusé de cette merveilleuse liberté autant que l'a fait Vincent Van Gogh : allant porter l'oreille qu'il venait de trancher précisément dans le lieu qui répugne le plus à la bonne société. Il est admirable qu'il ait ainsi à la fois témoigné d'un amour qui ne tenait compte de rien et en quelque sorte craché à la figure de tous ceux qui gardent de la vie qu'ils ont reçue l'idée élevée, officielle, que l'on connaît.
Georges Bataille